Étant en voyage à Varsovie, j’avais grandement envie de visiter un camp de concentration. On nous parle de ces camps depuis le collège et je n’en avais pas encore visité un. J’avoue avoir beaucoup réfléchi avant de prendre ma décision car j’avais peur d’être trop sensible mais j’ai pris mon courage à deux mains pour découvrir une partie de notre histoire…

♦ Le trajet vers Lublin

Mon choix s’est donc porté sur le camp de concentration et d’extermination de Lublin-Majdanek, à deux heures et demi en train de Varsovie. Arrivée à la gare de Lublin., nous devions prendre un bus qui nous emmenait au camp mais celui-ci ne passait pas aux alentours de la gare. Nous avons fait un petit tour pour essayer de comprendre quelque chose aux arrêts de bus mais on ne savait pas lequel pouvait nous y emmener. Un bus arrive, je me précipite donc pour demander au chauffeur et arrêter de perdre plus de temps. Mais quelle galère ! Les chauffeurs de bus ne parlent pas anglais (et ne sont pas très commodes par la même occasion!). Donc on est repartis bredouille ! Étant à la gare on se dit qu’il y a bien un point informations qui pourrait nous renseigner, nous y sommes donc allés, mais surprise là encore la dame du point infos ne parle que polonais ! Nous n’arrivions pas à nous comprendre et là je vois une jeune femme tenant le magasin Relay de la gare, je me dis « là il y a moyen! » alors je fonce vers elle ! Elle parle un anglais moyen mais suffisant pour qu’on se comprenne seulement je prononçais très mal « Majdanek » et elle ne comprenait pas j’ai donc dû lui écrire pour qu’on se comprenne et cette fille très gentille a regardé sur son téléphone pour me dire quel bus prendre pour s’y rendre. Elle m’a ensuite tout noté sur un bout de papier. C’était donc le bus 161 pour nous emmener de la gare au camp de concentration ! Enfin nous allions y arriver (enfin presque…). Nous sommes à l’arrêt de bus du 161, nous attendons, le bus arrive, je montre le papier que la jeune fille m’a écrit (vu que je prononce mal le polonais) et le montre au chauffeur qui ne parle pas anglais bien évidemment. Et là il sort de sa cabine me fait des gestes et parle en polonais mais de manière très gentille on n’a compris (merci la communication non-verbale) que c’était bien ce bus mais dans l’autre sens et que l’arrêt de bus était de l’autre côté. Bref, nous l’avons remercié (« Dziekuje ») et nous dirigeons vers l’arrêt de bus qui semblait être enfin le bon et on a dû attendre le bus 30 minutes …. Je te jure qu’on se demandait vraiment ce qu’on faisait là à un moment. Bref une fois dans le bus nous y arrivons enfin ! (Compter 15min en bus)

©Adam Jones

♦ Le camp de concentration

Ce qui m’a le plus choquée c’était l’immensité du lieu ! Dès que nous sommes descendus du bus j’ai pu voir à quel point c’était grand. La visite fait plus de 5 km (270 hectares) et il faut au moins 2h pour tout visiter, c’est pour dire comme on a bien marché ce jour là !

Alors que je pensais que le camp serait excentrée celui-ci se trouve en fait dans la ville, comme un grand parc, sauf qu’on va rarement se balader dans celui-ci. L’entrée est d’ailleurs gratuite, ce que je trouve très bien pour ce genre de visites. On paye uniquement si on souhaite prendre une visite guidée mais là alors il vous faudra compter 5h de visite ! Les visites guidées se font en anglais, français, allemand, espagnol, italien et polonais.

Nous commençons notre visite par une sculpture qui marque l’entrée du camp que l’on nomme « le Monument ». Cette sculpture fût réalisé en 1969 en l’honneur des victimes des camps.

©Adam Jones

Nous marchons ensuite jusqu’à la zone fermée par des barbelés. À savoir que ce camp bien qu’il ait été quelque peu rénové pour accueillir un public touristique est bien resté dans l’état dans lequel les prisonniers ont vécus : les barbelés toujours présents, les mêmes chemins, les mêmes cabanons en bois (où on étouffe à l’intérieur), etc.

La première maison que nous voyons est une maison blanche qui servait de maison au médecin des SS puis est devenue la propriété du chef du camp. Puis, les premiers baraquement que nous visitons sont les bains des femmes et les chambres à gaz. Ils se situent à l’entrée du camp car c’est par ces baraquements que passaient les nouveaux arrivants pour qu’ils se fassent « ausculter ». S’ils étaient en bonne condition physique, ils les gardaient et les personnes âgées, malades, femmes et enfants passaient directement à la chambre à gaz. C’est très impressionnant comme arrivée au camp.

Nous visitons ensuite tous les cabanons où dormais les prisonniers. La plupart sont réaménager sous forme d’oeuvre qui nous rappelle ce qu’il s’est passé ici. J’ai trouvé ça très bien fait car tous les dortoirs devaient se ressembler on en voit donc 1 ou 2 dans l’état et les autres sont réaménagés.

Un musée a également été aménagé dans le camp et c’était une des parties les plus touchantes. Car on voit les visages de ceux qui sont morts dans ce camp. On nous raconte un peu de leur histoire et on voit des témoignages. Le musée n’est pas très grand mais la charge émotionnelle est suffisante.

Au milieu du camp, au niveau du 3e site de dortoirs, une statue règne sur le camp. Il s’agit de la Colonne des 3 Aigles réalisée par des prisonniers. En marchant jusqu’au bout du camp, nous arrivons au crématorium. On y découvre une table de dissection pour retirer aux victimes ayant été gazés tout objet de valeur. Puis de nombreux fours à taille humaine où les corps des victimes étaient disposés avant d’être incinérés. J’ai été choquée par un témoignage que j’ai lu dans cette salle venant d’un prisonnier du camp.

Comme le crématorium est un peu à l’écart du camp et que les prisonniers ne pouvait pas sortir de leur zone de barbelés, ils ne savaient pas ce qu’il s’y passait au début. Le témoignage racontait que lorsqu’ils voyaient une étouffante fumée noire sortir de cette grande cheminée, ils comprenaient ce qu’il se passait là-bas au fond du camp.

Notre visite se termina par le Mausolée. Ce monument qui se situe juste à côté du crématorium a été construit, comme celui qui se trouve à l’entrée, pour commémorer les victimes de ces camps. Sous sa coupole sont disposé les cendres des victimes du 3 novembre 1943, pendant une exécution de masse appelée « Emtefest« . Environ 18 000 de Juifs ont été fusillés dans des fosses situées derrière les crématoires pendant que les haut-parleurs diffusaient des valses de Strauss pour couvrir le bruit.

Sur la coupole du Mausolée, est inscrit une citation qui signifierait : « Que notre destin devienne pour vous un avertissement« . Nous retraversons tout le camp jusqu’à la sortie, la gorge nouée en ayant pris conscience des atrocités qui se sont passés il y a quelques dizaines d’années de cela en ce lieu.

Ce camp est vraiment resté en état. Contrairement à des échos que j’ai eu du camp d’Auschwitz qui est devenu très touristique (et payant), celui-ci n’est pas bondé de touristes, facile d’accès, gratuit et pas transformé par les hommes. On a plus de sensations en pensant à ce que ces hommes ont vécus dans ces camps vu que ceux-ci sont resté quasi-intact. Une chose qui m’a marqué c’est vraiment l’odeur qu’il y avait dans ces cabanons. Une odeur peu descriptible, de vieux, de bois humide et de chaleur étouffante.

♦ Mon ressenti

Ça n’a pas été facile de visiter un camp de concentration et encore moins d’écrire cet article dessus. Mais je suis fière de l’avoir visité. Je conseille à chacun d’entre vous d’en visiter un si vous en avez l’occasion et si vous n’êtes pas trop sensible bien sûr. En visitant le camp, nous essayons toujours de relativiser et de ne pas trop se laisser immergé par ce que nous voyons et ce que nous lisons, c’est tout à fait normal, on ne veut pas sortir de là en pleurant. Il faut se connaitre et savoir si c’est important pour nous de connaître une part de notre histoire et ça l’était pour moi. Je ne pouvais pas me rendre en Pologne sans y visiter un camp. Si tu as peur d’être trop sensible (comme moi), ne t’inquiète pas il y a mille et une façon de ne pas trop s’imprégner de l’atmosphère qu’il y a eu. Comme par exemple : y aller un jour de beau temps (ce que j’ai fait, le soleil ça aide !), ne pas lire tous les écriteaux, y aller avec quelqu’un qui te rassure, ne pas rentrer dans certains cabanons si c’est trop dur… En tout cas, chacun sa façon de réagir et de voir les choses face à l’histoire.

Mon choix s’est porté sur le camp de Lublin-Majdanek par rapport à sa distance avec Varsovie. Cependant, en cherchant des infos sur ce camp j’ai pu remarqué que mis à part le site internet c’était très difficile de savoir ce qu’on y verrait et comment organiser notre sortie. Je trouve ça dommage car je pense que ce camp vaut le coup d’être visité et j’espère que cet article aidera ceux qui veulent organiser leur sortie dans ce camp.

 

♦ Bilan du Camp de Lublin-Madjanek

  • C’est à la fois un camp d’extermination, un camp de prisonniers de guerre (soviétiques et polonais) et un camp de concentration nazi
  • Fonctionnement de 1941 – 1944
  • D’après les registres, environ 500 000 personnes sont passées par ce camp venant de plus de 50 pays
  • Au plus fort de son activité, il a accueilli 50 000 prisonniers
  • De 170 000 à 235 000 personnes moururent ou furent tuées à Majdanek, dont 60 000 à 80 000 Juifs
  • Le nombre de victimes des chambres à gaz de Majdanek n’est pas connu

♦ Informations pratiques

  • Train Varsovie-Lublin environ 2h30 de trajet et 8€ le billet. Des trajets assez fréquents en journée.
  • De la gare de Lublin, prendre le bus 161 direction Felin. Environ 15 minutes de bus.
  • Entrée gratuite au camp (mais un don est appréciable)
  • Environ 2h de visite libre
  • 5h de visite guidée en anglais, français, espagnol, allemand, italien ou polonais.
  • Site du camp de Lublin-Majdanek : http://www.majdanek.eu/en 

As-tu déjà visité un camp de concentration ? Si oui, lequel ? Et quel est ton ressenti ?

xoxo Cindy

 


ON SE RETROUVE SUR PINTEREST ? 

Voici les images à épingler pour retrouver mon article plus facilement. Encore plus de photos sur mon compte Pinterest

10 Comments

  1. Je suis tombée sur ton blog par hasard et y découvre avec plaisir le contenu …
    J’en profite pour répondre … Étant plus jeune j’avais visité le camp de Buchenwald en Allemagne … Je devais avoir une douzaine d’années … Ce qui m’avait frappé, c’était le silence des lieux … Je me souviendrai toute ma vie de cette journée …

    1. Merci de ton commentaire Annabelle ! Visiter ces lieux chargés d’histoire sont difficiles surtout lorsqu’on est jeunes. On a chacun quelque chose qui nous a marqué dans ces lieux.

    1. Merci de ton commentaire Sylvain. Il est vrai que ce n’est pas facile d’écrire un article sur le thème des camps de concentration.

  2. Bonjour Cindy,

    Je suis passé à Madjanek en septembre 2018. Votre ressenti est bien décrit. Toutefois, il ne s’agit pas d’un camp de concentration, mais il était l’un des deux seuls à bénéficier du double statut : extermination ET concentration, à l’instar d’Auschwitz-Birkenau. A propos de celui-ci, l’entrée n’est pas payante (sauf visite guidée). En revanche un don n’est pas refusé pour garder en l’état des bâtiments qui se dégradent au fil des années : constructions hâtives par des non-professionnels, matériaux de récupération, volonté de constructions non pérennes destinées à être détruites.
    Beaucoup de monde, certes, mais ce n’est pas touristique et les français bien peu présents. Il est préférable d’y arriver tôt le matin. Le désagrément vient plutôt de ces milliers de selfies impudiques et obscènes. En revanche, plutôt que d’aborder ce site de la Shoah par beau temps, il est recommandé de le voir en plein hiver sous la neige ou sous la pluie, c’est-à-dire en conditions réelles.

    1. Bonjour Millé et merci pour votre retour.
      En effet, j’ai notifié plus bas dans l’article comme quoi Lublin-Madjanek était un camp de concentration et d’extermination. Je rajoute dans l’article que un don est appréciable.
      Le site n’est pas touristique et pour ma part, je n’ai pas vu de selfie.
      Il est vrai que découvrir ce lieu sous la neige ou par temps de pluie doit être vraiment impressionnant !

  3. Bonsoir
    J’ai visité ce camp en 1972 , j’étais alors âgée de 7 ans , bien que la visite normalement était interdite aux enfants de cet âge ..
    J’étais sur les épaules de mon papa et jusqu’à la fin de mes jours je me souviendrais de cette horreur
    Les fours ,les chaussures et l’odeur .Comment l’espèce Humaine a pu faire cela sous prétexte d’une race supérieure
    Ne n’oublions jamais ce qui s’est passé pour ne pas devoir connaître ces relans nationalistes , extrémistes ,xénophobes

    1. Bonsoir Diderot, et je suis totalement d’accord avec vous, n’oublions pas l’histoire !
      Cette visite a dû être traumatisante à cet âge j’imagine.
      Merci pour votre retour d’expérience.

  4. Bonjour,
    Auschwitz est gratuit.
    Bien entendu, le nombre de touristes peut être gênant, surtout quand ils se comportent mal, parlant fort, prenant des selfies… Mais ces comportements gênants ne sont pas réservés aux lieux de mémoire. Pour information, voir Yolocauste, travail par un artiste Israélien sur les comportements stupides des instagrameurs. Édifiant.
    Il y a également beaucoup de groupes ce qui ne facilite pas l’accès aux vitrines.
    D’ailleurs, il est préférable d’éviter les saisons « touristiques », l’hiver donnant une leçon sur les conditions endurées par les victimes et permettant de parcourir le camp plus tranquillement.
    Surtout, ne pas passer à côté du pavillon français qui retrace cinq destins de victimes et le livre des noms particulièrement impressionnant.
    Bref, visite indispensable, les deux sites de Auschwitz 1 et Birkenau se complétant.

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